On me demande souvent comment me vient l'inspiration.





Souvent les autres voient des choses
qui nous demeurent invisibles.






C’était trois jour après la rentrée au CM1. Les jumeaux Da Silva avaient lancé un défi : « le premier qui ramène une photo de lui tout seul avec la maîtresse a droit de vie ou de mort sur toute la classe ». Les filles étaient éliminées d’office parce que c’était une idée de garçons. Éliminés aussi les jumeaux du fait qu’ils étaient inséparables et du coup un de trop pour être en tête-à-tête avec la maîtresse. Le Gros Benoît avait commencé très fort avec un polaroïd sur lequel on le voyait planté tout seul devant chez elle. En regardant mieux on était censé la voir à sa fenêtre, mais il a bien été obligé de constater que c’était un pur reflet de son imagination. Le lendemain matin Tif Razou était arrivé les yeux cernés par une nuit de veille devant son écran avec un grossier trucage bricolé sur son ordinateur. Eliminé. Augustin avait presque réussi, mais elle était de dos, floue, dans une voiture, derrière un camion. Raté. Le Fido avait déguisé sa grande sœur. Bien essayé. Et le Deniche son pépé. Faut pas exagérer.
Pour ma part le plus difficile avait été de bien doser la mort au rat et de la mélanger habilement, mais généreusement, aux raviolis de la cantine le jour de la photo de classe. Mon triomphe avait été sans partage. Sauf avec la maîtresse bien sûr. Mon heure de gloire avait sonné en format 13 x 18 sur papier brillant. En souverain absolu et en vertu de mon droit de vie ou de mort, j’exigeai que chacun achète la photo de classe sur laquelle mes souliers brillaient comme deux marrons dans la rosée un matin d’automne.






On a ses petites habitudes.






Maximum respect.